• In French: Stephen Knight (Peaky Blinders) "avec la BBC, tout s'est déroulé très facilement"

    Steven Knight : « Avec la BBC, tout s’est déroulé très facilement, à l’opposé de Hollywood où je travaille habituellement »

    Le Monde.fr | 11.03.2015 à 14h58 • Mis à jour le 11.03.2015 à 15h24 |  

    Propos recueillis par Martine Delahaye



    Le créateur de la minisérie Peaky Blinders, dont Arte diffuse le début de la première saison jeudi 12 mars, a eu une totale liberté de la part de la BBC pour ce projet passion.

    Alors que vous écrivez des longs-métrages pour Hollywood depuis votre Oscar du meilleur scénario original pour Dirty Pretty Things (2002) de Stephen Frears, comment en êtes-vous venu à créer « Peaky Blinders » pour la BBC ?

    « Peaky Blinders » est une récréation par rapport à mon travail aux Etats-Unis : ça relève du projet passion, pour le plaisir ! Je l’avais dans mes cartons depuis au moins vingt ans car originaire de Birmingham, j’ai entendu parler de l’histoire des Peaky Blinders depuis toujours par mes propres parents.

    Ma mère travaillait pour des bookmakers illégaux quand elle n’avait que 9 ans, les enfants n’étant pas mis en prison si on les attrapait en train de prendre les paris. Mon père, lui, m’a souvent raconté que, quand il n’avait encore que 7 ou 8 ans, son père lui avait remis une note pour mes oncles. Or ces derniers étaient des Peaky Blinders, des bookmakers illégaux : terrifié, il a couru tout au long du chemin, frappé à une porte, et a aperçu, autour d’une grande table couverte d’argent, des hommes impeccablement habillés buvant leur bière à même des cruches : ils ne dépensaient aucun argent hormis pour leur habillement et leur image.

     

    image: http://tag-dyn.omnitagjs.com/fo-dyn/native/preview/image?key=79418fdb4760576c9d33c28d65698fe9&ztop=0.37333333333333335&zleft=0.37&zwidth=0.26&zheight=0.26&width=94&height=63&kind=INTERNAL

    Toujours plus de musique Dance

    image: data:image/png;base64,iVBORw0KGgoAAAANSUhEUgAAAC4AAAAFCAMAAAANDC7wAAAAGXRFWHRTb2Z0d2FyZQBBZG9iZSBJbWFnZVJlYWR5ccllPAAAAyNpVFh0WE1MOmNvbS5hZG9iZS54bXAAAAAAADw/eHBhY2tldCBiZWdpbj0i77u/IiBpZD0iVzVNME1wQ2VoaUh6cmVTek5UY3prYzlkIj8+IDx4OnhtcG1ldGEgeG1sbnM6eD0iYWRvYmU6bnM6bWV0YS8iIHg6eG1wdGs9IkFkb2JlIFhNUCBDb3JlIDUuNS1jMDE0IDc5LjE1MTQ4MSwgMjAxMy8wMy8xMy0xMjowOToxNSAgICAgICAgIj4gPHJkZjpSREYgeG1sbnM6cmRmPSJodHRwOi8vd3d3LnczLm9yZy8xOTk5LzAyLzIyLXJkZi1zeW50YXgtbnMjIj4gPHJkZjpEZXNjcmlwdGlvbiByZGY6YWJvdXQ9IiIgeG1sbnM6eG1wPSJodHRwOi8vbnMuYWRvYmUuY29tL3hhcC8xLjAvIiB4bWxuczp4bXBNTT0iaHR0cDovL25zLmFkb2JlLmNvbS94YXAvMS4wL21tLyIgeG1sbnM6c3RSZWY9Imh0dHA6Ly9ucy5hZG9iZS5jb20veGFwLzEuMC9zVHlwZS9SZXNvdXJjZVJlZiMiIHhtcDpDcmVhdG9yVG9vbD0iQWRvYmUgUGhvdG9zaG9wIENDIChNYWNpbnRvc2gpIiB4bXBNTTpJbnN0YW5jZUlEPSJ4bXAuaWlkOjFERjkyQjgzNDk1QTExRTM5MDkxOEQyNjU5RUVFRjBCIiB4bXBNTTpEb2N1bWVudElEPSJ4bXAuZGlkOjFERjkyQjg0NDk1QTExRTM5MDkxOEQyNjU5RUVFRjBCIj4gPHhtcE1NOkRlcml2ZWRGcm9tIHN0UmVmOmluc3RhbmNlSUQ9InhtcC5paWQ6MURGOTJCODE0OTVBMTFFMzkwOTE4RDI2NTlFRUVGMEIiIHN0UmVmOmRvY3VtZW50SUQ9InhtcC5kaWQ6MURGOTJCODI0OTVBMTFFMzkwOTE4RDI2NTlFRUVGMEIiLz4gPC9yZGY6RGVzY3JpcHRpb24+IDwvcmRmOlJERj4gPC94OnhtcG1ldGE+IDw/eHBhY2tldCBlbmQ9InIiPz5eE2d9AAAABlBMVEWUnaT////IsaZ7AAAAAnRSTlP/AOW3MEoAAAA+SURBVHjalI7RCgAwCALP///pQaRtgz0MIgpPEUASNcrjZY1Wwey4gh+Cfe/0Oja84Z90KS2n49U96UuAAQBGHwCaOLUkNAAAAABJRU5ErkJggg==

    Toujours plus de musique Dance

    Toutes les icônes de House et d’électro réunis dans une playlist pour vous faire vibrer au son des plus gros hits dance français ! Suivez toute l’actualité musicale pour des soirées qui déchirent !

    Ayant donc entendu plein d’histoires sur les Peaky Blinders tout au long de ma vie, j’ai toujours eu envie d’en parler. D’autant que cette période de gangstérisme entre Birmingham et Londres dans les années 1920 n’a jamais été traitée au cinéma. Un film de deux heures aurait été trop court pour déployer ce genre d’histoire, je l’ai donc proposé pour une série télévisée lorsqu’une productrice m’a demandé ce que j’avais dans mes cartons.

    La réalisation d’Otto Bathurst et les décors donnent souvent la sensation d’une violence stylisée, d’une minisérie enluminée d’un voile doré, en quelque sorte…

    Effectivement, cela correspond à la façon dont cela a été écrit et tourné. J’ai voulu que l’on approche ces Peaky Blinders comme s’ils appartenaient à la mythologie, comme s’ils étaient des héros aux yeux d’un gamin de dix ans. Ces hommes violents, les chevaux, les tenues impeccables, etc., tout cela ne pouvait qu’épater le gamin qui les côtoyait.

    Le Parrain est la seule référence à laquelle j’ai pensé pendant l’écriture de « Peaky Blinders »

    Nous avons donc essayé de tourner comme si la ville était bucolique, alors que l’époque et ces gens étaient très noirs, durs et fiers.

    Tout est filmé comme si on était au soleil couchant, avec une brillance qui doit donner l’impression que l’on est plus dans le souvenir que dans le récit réaliste. L’idéal, pour mieux s’en rendre compte, aurait été de le tourner en sépia mais on ne pouvait pas le faire. On a donc choisi la version éclat, embrasement.

    Avez-vous déterminé à l’avance ce que va devenir le personnage de Tommy Shelby, patron des Peaky Blinders ?

    Non, je suis d’un tempérament à me renseigner énormément avant d’écrire pour créer ce type de personnage, mais à le laisser vivre ensuite.

    image: http://s1.lemde.fr/image/2015/03/11/534x0/4591491_6_9310_le-gang-des-peaky-blinders-et-son-chef-tommy_a5be887a64c0be973380623c3607eeaf.jpg

    Le gang des Peaky Blinders et son chef Tommy Shelby (Cillian Murphy)

    La famille au centre de tout, des dissensions même très fortes qui n’en entament jamais l’unité, on pense parfois au Parrain

    En fait, je ne regarde ni télévision ni cinéma, autant que je le peux, pour que ça n’influence pas mon écriture. Mais Le Parrain est la seule référence à laquelle j’ai pensé pendant l’écriture de « Peaky Blinders ».

    Mais une seule vraie question se pose à moi concernant Tommy Shelby : quelqu’un de ce milieu a-t-il une quelconque chance d’en sortir, de s’en sortir ?

    Sur quelle période de temps, aimeriez-vous mener cette saga ?

    L’idéal, ce serait d’embrasser la période qui va de la fin de la première guerre mondiale au début de la seconde, en sautant deux ans entre chaque saison, pour voir les personnages évoluer.

    La BBC donne-t-elle des indications sur ce qu’elle attend pour son public ?

    Non, tout est très facile avec la BBC : s’ils aiment, ils disent oui et vous laissent écrire tranquillement, sans rien demander à lire, sans rien vérifier. A peine si on vous demande s’il serait possible de changer un ou deux mots par-ci par-là, mais sinon, c’est la liberté totale.

    Avec la production, j’ai choisi les acteurs, le réalisateur, le décorateur, en toute liberté là aussi. Nous avons ensuite tourné dans la foulée, à Liverpool surtout, un peu à Manchester et à Birmingham. Tous les jours je recevais les rushes par voie numérique car j’aurais pu intervenir si je l’avais souhaité, à défaut d’aller sur le tournage. Mais en fait, quand on a confiance dans l’équipe et les acteurs, ça roule sans nécessité d’intervenir.

    Ce qui est super avec la BBC, c’est qu’il n’y a pas de protocole ou de canevas précis à suivre pour faire connaître et aboutir un projet. Même si j’avais travaillé pour la télé autrefois, c’était ma première expérience de fiction pour la BBC, et tout s’est déroulé très facilement. C’est absolument l’opposé de Hollywood où je travaille habituellement : ça a été comme des vacances pour moi !

    La BBC a-t-elle dégagé des moyens financiers particuliers pour la très belle mise en scène de cette mini-série ?

    Non, grâce aux images de synthèse en 3D, aujourd’hui, on peut créer des décors et disposer d’images auparavant inaccessibles ; on peut tourner ce genre de minisérie, très bien réalisée, sans dépasser le budget habituel qu’y met la BBC.

    De toute façon, je sais par expérience que la liberté suppose un petit budget. Dès que l’on passe à un budget important, que des gens risquent beaucoup d’argent sur votre projet, ils veulent en avoir le contrôle.

    Sur quoi travaillez-vous en ce moment ?

    Je viens de finir l’écriture de World War Z 2, avec Brad Pitt et un film d’espionnage dont on m’a confié le scénario. Je vais maintenant me plonger dans l’écriture de la saison 3 de « Peaky Blinders ».

    • Martine Delahaye
      Journaliste au Monde

    Tags Tags: , , , ,